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La création d’un univers

La création d’un univers

 

Tels des dieux éternellement insatisfaits, les maîtres de jeu ne se contentent pas des univers existants mais finissent souvent par créer leur propre monde. 

 

Au cours de la courte mais dense histoire du jeu de rôle, nombre de grandes sociétés d’édition ont proposé des mécaniques et des conseils pour créer un monde complet ou plus modestement un pays, une province ou une ville. 

Un des premiers exemples qu’il m’ait été donné de lire est le « Campaign law » de Rolemaster, dont on peut trouver la présentation sur le GROG. 

Dans tous ces ouvrages, on trouve les thèmes habituels : cosmogonie, géographie, peuples, cultures, faune (dont les inénarrables bestiaires monstrueux !), flore, politique, économie, etc. Il est alléchant, à partir de cela, de se lancer dans la création, surtout qu’en général, nous prenons un système que nous apprécions, voire des règles maison.

 

Voilà ce qui vous attend si vous vous lancez dans l’aventure en partant de zéro (ou presque !).

 

Une bien belle carte. Voilà un MJ bien inspiré ! Espérons que l’univers de jeu soit riche…

C’est parti pour la genèse !

 

Au début, vous êtes pris dans l’euphorie créatrice. Les idées sont là et vous entamez les chapitres qui vous inspirent le plus. Qui la cosmogonie, qui l’histoire ou la géographie. Et, si vous êtes comme moi, que vous aimez la cohérence, tous les éléments se relient entre eux. Pourquoi tel peuple habite là ? Comment la magie se justifie ? Que sont devenus les dieux ? Et les prêtres, leurs rituels, la foi, les ordres religieux ? Où vivent tous ces gens ? Ah, oui, faire une carte ! Non, des cartes ? Puis les villes, etc, etc.

Dans le même temps vos joueurs vous demandent « Quand est-ce qu’on joue à ton jeu ? » Vous faites des annonces, vous revoyez votre calendrier et la tache prend des proportions… divines. C’est à ce moment là que vous vous demandez si vous n’avez pas voulu trop bien faire, si tout créer n’était pas trop ambitieux. En général, deux options s’offrent à vous : abandonner ou commencer votre jeu avec des trous immenses, des gouffres que vous vous promettez de remplir au fur et à mesure. Finalement, vous vous rendez compte qu’être un dieu n’est pas si simple.

 

Si vous voulez mon avis, ce n’est pas la bonne méthode pour commencer. Au lieu de partir de l’extérieur du cercle pour vous rapprocher du centre, là où se trouvent vos joueurs, il vaut mieux faire l’inverse. Mais pas n’importe comment.

 

Sur ce coup-là, on sent le bricolage fait à la va-vite.

C’est reparti… mais avec modestie.

 

1- Commencez par deux-trois grandes idées sans entrer dans le détail. Si vous décidez, par exemple, que les aventures se dérouleront dans un pays sauvage mais où la religion a beaucoup d’importance, faites un point focal sur la faune, la flore et la religion. Pas la peine de vous lancer dans les mÅ“urs de l’aristocratie que les PJ ne découvriront qu’on bout d’un voyage de 500 km.

 

2- Créez ce qui entoure les personnages de vos joueurs. Dans cette optique, faîtes un groupe cohérent culturellement et géographiquement, cela vous évitera de trop vous éparpiller. Là encore entrez dans le détail de ce qui peut intéresser vos joueurs. Si l’un d’eux joue un forgeron, il peut être sympathique que vous réfléchissiez à l’histoire des fameux Forgelames et de leurs traditions. S’il y a un archer, il aimera sans doute connaître la faune qu’il pourra chasser, les arcs spéciaux qu’il peut acquérir. Rien ne vous empêche de lui parler des arcs divins des prêtres des Hauts Plateaux, sans pour autant entrer dans le détail si vous êtes sûr que ce n’est pas accessible à court terme. Cela lui fera – et à vous aussi ! – un but pour l’avenir.

 

3- Si vous aimez les cartes – Personnellement, c’est ma marotte ! -, faites en une de la région proche, là où évolueront les PJ dans les premiers scénarios. Vous pouvez tracer grossièrement la géographie globale du continent où ils se trouvent, histoire de placer les grandes zones climatiques et les pays voisins mais ne vous fatiguez pas à entrer dans le détail, il est possible qu’ils n’aillent jamais là où vous l’espérez.

 

4- Jugez du degré de précision qu’attendent vos joueurs et de leurs pôles d’intérêt. S’ils aiment les interactions sociales, travaillez la psychologie de vos PNJ en profondeur, s’ils préfèrent l’action… travaillez plutôt leurs capacités de combat. Si vous estimez que certains éléments sont importants mais que vous savez pertinemment que vos PJ ne vont ni s’y intéresser ni interagir avec, contentez vous de quelques notes que vous garderez pour vous.

 

5- Quels que soient vos choix, posez-vous toujours la question du pourquoi et du comment afin que ce que vous inventez fonctionne avec le reste du monde – J’ai fait un article sur le sujet « Toujours se demander pourquoi » -. Le but n’est pas d’éliminer la part de fantastique mais de faire que l’univers tienne debout avec cette part d’irrationnel. Dites-vous que, dans votre création, le commun des mortels doit pouvoir vivre, construire, se reproduire, etc. Pensez aussi à l’équilibre et à l’intérêt ludique. Si vous décidez que les démons peuvent descendre sur votre monde et tout ravager, ayez une bonne raison justifiant leur venue. Y a-t-il des conditions pour que cela arrive ? Comment survit le monde à pareil événement ? Cela créera-t-il du jeu ou, au final, allez-vous pourrir vos parties avec votre décision qui vous semblait au départ pertinente ? Est-ce l’ambiance que vous recherchez ? Et vos partenaires, qu’en pensent-ils ?

 

6— Piquez les idées des autres. Oui ! Vous m’avez bien lu. Si le concept d’un tiers est bon, usez-en. Il ne faut pas se le cacher, tout le monde se sert de l’existant. Que ce soit Zola qui s’inspire des mœurs de ses contemporains en passant par Gygax qui détourne les races du Seigneur des Anneaux, tout le monde a recours à ce qu’il voit, lit ou écoute. Si utiliser la carte d’un autre jeu vous fait gagner du temps et qu’elle vous semble pertinente, et bien, allez-y. Évidemment, ce genre de détournement flagrant ne s’applique qu’au cercle privé d’un jeu amateur.

 

7— La réalité est pleine d’excellentes idées prêtes à être manipulées. Puisez dans l’information du moment, mais aussi, dans le passé. Les légendes arthuriennes ont une base historique avant de devenir l’univers mythique que l’on connaît.

 

8— Sans livrer tous les secrets de votre ouvrage, n’hésitez pas à solliciter l’avis de vos condisciples ou celui des créateurs/joueurs/fans que l’on trouve sur les réseaux sociaux. Il existe des groupes Facebook dédiés au jeu et ceux qui les fréquentent ne demandent qu’à vous aider. Soyez prêt à accepter la critique. Cela vous évitera de vous lancer dans des voies sans issue ou vers des concepts déjà en usage. S’il est bon de prendre les idées des autres, il ne faut pas non plus faire une copie conforme de l’existant.

 

9— Travaillez à plusieurs si la tâche vous paraît insurmontable. Le brassage des idées et les échanges boosteront votre créativité. De plus, certains préfèrent un domaine à d’autres, vous pourrez ainsi vous concentrer sur vos sujets de prédilection. Attention tout de même à être en phase avec vos collaborateurs au risque de faire échouer votre projet.

 

10— En guise de dernier conseil, ne perdez pas de vue votre plaisir. Même si vous cherchez le divertissement des autres, vous ne devez pas oublier le vôtre. Tout sera plus facile si vous attaquez votre Å“uvre avec enthousiasme… le tout avec un minimum de méthode !

Tuto Débutants 3. Créer son personnage. (partie 3 sur 3)

Tuto Débutants 3. Créer son personnage. (partie 3 sur 3)

 

Troisième et dernière partie : le rôle – disons plutôt la façon de jouer votre PJ – C’est ce qui rendra votre personnage humain – ou extra-terrestre, ou divin…–, ce qui déterminera son caractère. Ces choix dépendent uniquement de vous mais c’est, sans doute, les plus difficiles à faire si vous voulez jouer quelqu’un d’autre que vous-même.

 

Incarner un perso : lâchez-vous, vous êtes la vedette !
Incarner un perso : lâchez-vous, vous êtes la vedette !

Toujours sur le même principe, quelles questions se poser sur le rôle que l’on veut incarner ?

 

  • Comment le rendre original ?

A moins que vous n’aimiez jouer des clones de héros connus – ou de vous-même – vous allez chercher à personnaliser votre personnage pour qu’il soit unique. L’intérêt n’est pas égoïste, les autres seront surpris et contents de vous découvrir si vous êtes originaux. J’ai connu un joueur qui avait immanquablement le même background de personnage. Pour lui l’originalité était de se donner une arme et une aptitude différentes. Pourquoi pas mais je vous assure qu’au bout d’un moment c’était lassant de savoir comment il allait réagir.  Je n’ai jamais autant pris de plaisir qu’avec des joueurs surprenants et originaux. On peut faire aapparaîtredes particularités en cours de partie mais il est intéressant de créer d’emblée un personnage sortant de l’ordinaire. Souvent en mélangeant les réponses aux questions qui suivent on peut obtenir des choses surprenantes, même en utilisant des archétypes.

Imaginons que vous jouez un privé dans une ambiance années 30. Tout de suite on pense à Marlowe, feutre de biais, clope au bec, odeur de whisky et femme qui l’a quitté. Abandonnons-le et prenons un autre archétype, celui du dépressif à la Woody Allen. Il ne ressemble à rien mais plait étrangement aux femmes, a une mère possessive, est expert en littérature, terrorisé par à peu près tout, timide à l’extrême et connait tous les psys de la ville. Maintenant transformons-le en détective. Et vous voilà avec un PJ assez original.

Vous pouvez aussi lui faire un passé de père de famille tranquille, le caractère de Conan le barbare et les objectifs de Darth Vador. Il faut juste trouver des raisons à tout ça mais c’est réalisable.

 

  • Quel est son passé ?

Le passé c’est l’occasion de mettre en place les contacts et les mystères qui entourent votre personnage. Inventez vous une histoire qui tient debout, pas comme dans les films américains où des bimbos de 25 ans ont 3 doctorats et ont participé à 5 guerres. Non, essayez de rester logiques. Le simple fait d’avoir de la famille et de lui donner des traits de caractère vous guidera. Cela influencera vos propres traits de caractère. Pas besoin d’avoir lu tout Freud, un peu de bon sens suffit. Regardez autour de vous les expériences familiales et n’hésitez pas à les utiliser pour faire vos persos. Ajoutez-y un peu de panache, c’est plus excitant. Laissez quelques périodes obscures que le MJ ou vous pourrez combler quand le besoin s’en fera sentir. Prévoyez quelques ennemis, ça fait toujours plaisir de les ressortir à un moment dramatique.

 

  • Quel est son caractère ?

Choisissez-le bien car il faut que vous ayez envie de le jouer et que vous vous en sentiez capable. Essayez de ne pas faire des choix incompatibles avec la notion de jeu en groupe – du moins si vous comptez jouer plus d’une partie avec ce PJ. L’asocial, hyper violent, autiste, drogué et paranoïaque c’est rigolo sur le papier mais difficile à supporter pour les autres. Sauf si vous jouez en solo.

Essayez de vous détacher de vos traits personnels. C’est difficile mais ça fait partie du challenge et surprend vos compagnons de jeu.

Je mets aussi dans ce chapitre, les petites habitudes, les accents, la façon de se mouvoir. Bref, tout ce qui donnera du corps à votre perso. Un PJ qui se ronge les ongles, zézaie, a la carrure d’un ours et se déplace en conséquence, on le reconnaîtra.

Le JdR c’est comme l’improvisation théâtrale, il faut se construire un personnage avant de faire une histoire.

 

  • Quels sont ses objectifs ?

Je l’ai mis au pluriel parce que les personnages monomaniaques sont limités. Une fois leur objectif atteint, on a parfois du mal à imaginer la suite de leurs aventures. Le cas typique est celui qui cherche à se venger d’UN adversaire. Une fois que c’est fait, ou que l’adversaire a disparu, le PJ se retrouve souvent perdu. Dans les films cela fonctionne bien, le mot FIN apparaît et l’on va se coucher mais en tant que joueur, il faut se dire qu’il y aura une suite. Pensez aux séries télé actuelles et vous verrez que les mécanismes des histoires sont un peu différents de ceux des films dont aucun prolongement n’est prévu.

  • Sera-t-il jouable avec les PJ des autres joueurs ?

C’est vrai que c’est totalement artificiel de se poser cette question. Je vous ai parlé tout au long de ces 3 articles de faire un personnage cohérent et maintenant je parle de jouabilité par rapport aux autres. C’est une des contraintes du JdR. En général, le MJ vous orientera pour éviter que votre personnage ne tombe comme un cheveu sur la soupe. A part quelques pervers… Là aussi je me nourris d’expérience passée où les parties ont tourné au ridicule. Une histoire où l’on devait jouer des diplomates mais où le MJ nous a fait tirer nos backgrounds au hasard – une idée incongrue. On avait un barbare chasseur, un mendiant et un noble. Pas besoin de vous faire un dessin pour que vous compreniez que deux des joueurs se sont sentis inutiles et démotivés.

Sans chercher fatalement à « combler les trous »  dans le groupe en jouant la carte de la compétence qui sera utile, il faut essayer de se poser la question : « Pourquoi mon perso participe à l’aventure ? » et « Pourquoi reste t-il avec les autres ? »

 

Conclusion

 

J’ai fait le tour des questions que je me pose quand je suis joueur pour créer un nouveau personnage. Il y a sans doute d’autres méthodes et même des meilleures. Pendant longtemps, j’ai joué sans ce petit guide, au petit bonheur la chance. Il y a eu de bonnes parties et d’autres moins passionnantes. Pour de multiples raisons mais aussi parfois parce que j’avais raté le coche en créant mon perso. Dommage.

J’espère que ce tutoriel vous aidera à aborder plus sereinement la création d’un nouveau personnage. Mais, n’oubliez pas, tout ceci est facultatif, ça n’est qu’un jeu !

Tuto Débutants 3. Créer son personnage. (partie 2 sur 3)

Tuto Débutants 3. Créer son personnage. (partie 2 sur 3)

 

Suite du tutoriel sur la création de personnage. Si les règles constituaient les limites, l’univers pourrait être comparé à l’armature qui soutiendra votre personnage. La prochaine fois, dans la troisième partie nous verrons la finition, ce qui rend votre personnage vivant, le rôle.

  • L’univers

Comme les règles, l’univers va vous imposer des limites qui peuvent enrichir votre jeu mais aussi être contraignantes. Adaptez vos envies à ces contraintes :

  • Quelles sont les lois sociales, morales et physiques du monde dans lequel on évolue ?

Trois questions en une.

  • Les lois sociales : prenons l’exemple d’un monde médiéval japonais où le samouraï a droit de vie et de mort sur ses inférieurs. Si vous jouez un marchand, ne soyez pas surpris, le jour où vous ferez le kéké, de vous faire trancher en deux par un porteur de sabre, qui peut être incarné par un autre joueur, même si dans la vraie vie c’est votre meilleur pote. Inversement, si c’est vous le samouraï, rien ne vous empêche d’agir de même puisqu’il en est ainsi dans ce jeu là. On voit bien la contrainte mais il y a derrière cela une richesse de jeu. : comment votre marchand va essayer de convaincre ou d’humilier ce seigneur qui peut l’occire à tout moment ? Plus simplement, il vous faudra accepter de jouer servilement parce que « c’est ainsi », c’est une notion qui sort de notre culture mais qui dans l’univers où vous jouez est tout à fait normal. Il est donc important de connaitre ces contraintes et de les accepter, ou de jouer un PJ qui peut s’en abstenir si elles vous paraissent impossible à jouer.
  • Les lois morales : le principe est le même que pour les lois sociales mais elles sont souvent plus discrètes et plus difficiles à interpréter. Exemple tiré d’une réflexion entendue par un de mes joueurs : « Moi en 1914, j’aurais déserté, je n’aurais jamais été me faire tuer comme les gars à l’époque ». Réflexion d’un homme du XXIème siècle. Mais à l’époque, la question ne se posait que rarement. Nourris par le patriotisme et les discours sur l’honneur de la patrie, les soldats allaient se battre sans rechigner, ou s’ils rechignaient, ils le gardaient pour eux. C’est ce que j’appelle une loi morale : à l’époque, la pensée majoritaire allait dans ce sens. On peut toujours jouer comme maintenant, ça n’est pas interdit mais si tout le monde agit ainsi on sort de l’univers imposé. Ca n’a plus grand intérêt. Après, le MJ ou le jeu peut imposer des lois particulières – voir la question sur l’ambiance – et dire, par exemple, que l’on joue la Première Guerre Mondiale avec une ambiance Pulp. Ok, pas de problème, le tout est de le savoir au début pour choisir son PJ en fonction de ce que l’on veut et que l’on peut jouer.
  • Les lois physiques : quand je dis physique, cela couvre aussi bien la physique naturelle que le niveau technologique de l’univers. Pour forcer le trait, disons que vous n’allez pas choisir d’être allergique à l’eau dans un jeu où vous incarnez des poissons. Où alors, il vous faut penser à une raison pour justifier de votre survie dans l’univers. C’est là que ça peut devenir intéressant au niveau de la création. Pour le matériel, c’est plus une histoire de rentabiliser votre personnage. Rien ne vous empêche de faire un spécialiste en droit humanitaire international dans un jeu post apocalyptique où s’entredéchirent des gangs de cannibales mais dites vous que si vous avez tout misé sur votre compétence vous risquez de vous ennuyer un peu autour de la table. Je ne suis pas pour la « rentabilisation » à l’extrême mais évitez de faire un personnage à côté de la plaque. L’expert en combat en armure de plaque dans un jeu sur la guerre du Viet Nam, cela n’est pas de l’originalité, c’est de l’anachronisme.
L'univers dans lequel on joue, un vaste monde qu'il est bon de connaitre pour ne pas être perdu.
L’univers dans lequel on joue, un vaste monde qu’il est bon de connaitre pour ne pas être perdu.

 

  • Quelle est l’ambiance du jeu en général ?

Elle dépend beaucoup des gens autour de la table mais la majorité des jeux essaient d’avoir une ambiance spécifique. Le plus connu est le mythique « Appel de Cthulhu » qui se veut être un jeu « d’horreur ». Rien n’empêche de le jouer autrement mais si l’on respecte les poncifs, on sait que ceux qui ne seront pas morts ont de bonnes chances d’être fous à la fin de la partie, le tout dans une ambiance années 30 (tout au moins pour la première version du jeu). Vous voilà fixés. Ne rêvez pas de jouer Indiana Jones, ça n’est pas l’ambiance, d’ailleurs les règles ne vous le permettront pas tellement. Ca sentira le gluant, les ombres mystérieuses, l’asile psychiatrique à chaque coin de scénario. Vous pouvez faire un personnage qui n’entre pas dans le moule, c’est d’ailleurs ce qui deviendra intéressant au bout de 2-3 parties archétypiques mais l’ambiance vous rattrapera inexorablement. Alors, pensez-y en créant votre PJ. A moins d’un MJ complaisant, pas la peine de passer des heures à préparer votre background en détaillant votre généalogie et la liste de vos copains d’études. Faites dans le léger. Quelques lignes suffiront… vu les chances de survie que vous aurez. A moins que ce ne soit votre plaisir. Mais si vous pestez dès que votre PJ fignolé meurt, arrêtez tout de suite, vous allez vous faire du mal.

L’ambiance dépend aussi de ce que votre MJ veut faire jouer dans l’univers : dans Eclipse Phase par exemple, un MJ peut choisir de vous faire jouer aux confins de l’univers où vous allez découvrir d’autres mondes ou choisir que tout se passera sur Mars. Dans les deux cas, il peut respecter à 100% l’univers mais l’ambiance sera totalement différente. Et vous ne ferez pas obligatoirement votre personnage de la même façon. Dans le premier cas, le personnage sera plus adapté s’il est porté sur les voyages, connait la planétologie, a des amis à bord du vaisseau dans lequel il est. Dans le second cas, ça sera plus intéressant qu’il ait des contacts parmi la population, qu’il connaisse les factions martiennes, etc. Attention, je ne dis pas qu’il y a de mauvais choix, tout est possible mais il faut être sûr que cela vous convienne, que vous preniez du plaisir à jouer. En étant trop à côté de la partie, vous augmentez vous chances d’une mauvaise expérience.

  • A quelle échelle joue t-on ?

Quand je parle d’échelle, je ne veux pas dire « jouer plusieurs PJ », même si c’est tout à fait faisable mais plutôt quelle est l’envergure des parties que le MJ veut faire jouer ?

Epique, petite échelle : vous êtes des héros qui passez votre temps à sauver le monde de dangers qui ne vous laissent pas le temps de vous souvenir de votre passé (j’avais déjà parodié le sujet dans l’épisode 5 de « Vous êtes dans une auberge »)

Survivaliste, petites gens : vous êtes un humble paysan qui tente de survivre dans un monde med fan ravagé par la guerre.

Grande noblesse : même monde que la ligne au dessus mais, là vous jouez les nobles qui déplacent des armées.

Petit pion (deviendra grand ?) : vous êtes un pilote de chasseur spatial du grand armada qui compte 200 000 chasseurs comme le vôtre. Un jour peut-être serez vous l’amiral de la flotte ?

Entité supérieure : vous êtes un dieu, peut-être même plus. Vous pensez création du monde quand d’autres pensent réélection au conseil de quartier. Vous êtes immortel.

On pourrait en mettre plein d’autres mais vous voyez ce que je veux dire : le personnage épique notera le nom des démons qu’il a combattu, le paysan fera la liste de tous les objets de sa cahute, le noble dessinera son tableau généalogique le pilote aura une fiche pour son vaisseau spatial et le dieu aura des projet sur plusieurs millénaires. Intervertissez les priorités des uns et des autres et vous verrez que ça donne des trucs ridicules. Evidemment que, si vous jouez un riche à million, vous n’allez pas détailler le nombre de pièces de cuivre que vous avez, par contre il pourrait être intéressant de connaitre la loyauté de votre personnel et la fourberie du conseil d’administration de la société que vous contrôlez. C’est une histoire d’échelle. Intéressez vous à créer dans votre background ce qui est à votre portée en premier lieu. Le reste viendra – peut-être – plus tard. Immiscez vous dans ce qui entoure votre personnage. Cela rejoint le chapitre sur les trois lois mais en y ajoutant ce qui touche au plus près votre PJ.

A suivre…

Tuto Débutants 3. Créer son personnage. (partie 1 sur 3)

Tuto Débutants 3. Créer son personnage. (partie 1 sur 3)

 

Créer son personnage en jeu de rôle, c’est comme sculpter la terre. A la fin l’œuvre peut être réaliste ou subjective, belle ou laide, peaufinée ou bâclée. L’essentiel est que vous en soyez content. Mais n’oubliez pas que le JdR est une activité de groupe, pensez aux autres joueurs et essayez qu’ils aient eux-aussi du plaisir à voir évoluer votre héros.

 

L’objectif de cet article n’est pas de vous donner LA bonne méthode – il n’y en a pas ! – mais plutôt de vous amener à vous poser quelques questions pour construire votre personnage selon vos goûts. N’oubliez pas qu’en toute logique, il est possible que vous ayez à tenir ce rôle sur plusieurs parties, voire des années, alors autant que vous y preniez le plus de plaisir possible !

 

Dans l’article intitulé « Etre joueur » je parlais de certains thèmes qu’il faut à nouveau aborder ici : les règles et l’univers, entre autres. En troisième sujet, utilisons l’intitulé « Le rôle ».

Au départ je comptais faire un seul article mais la concision n’étant pas mon fort et le sujet étant plus vaste qu’il n’y parait, j’ai décidé de vous présenter le sujet en trois parties. Pour commencer :

 

  • Les règles

C’est paradoxal de ma part de parler en premier lieu des règles alors que je les utilise de moins en moins. Pourtant, elles génèrent les limites de votre exercice de création. Ce sont là des questions à poser à votre MJ car elles dépendent de sa façon d’interpréter les règles.

 

La fiche de personnage : clarté et compréhension sont les maîtres mots...
La fiche de personnage : clarté et compréhension sont les maîtres mots…
  • Joue t-on des personnages puissants ou non ?

La question n’est pas anodine. Un peu comme si vous vouliez jouer un personnage sérieux à Toons. Pas la peine de vouloir incarner un héros qui court au milieu d’un déluge de balles dans un jeu où une balle = un mort. Dans de nombreux jeux, la règle détermine vos chances de survie. Même si vous êtes un joueur habile ou qui veut ne pas prendre de risque, ne négligez pas ce fait sous peine de perdre rapidement votre PJ qui vous a pris beaucoup de temps de conception.

 

  • Le système de progression est-il rapide où va-t-on rester tel que l’on est longtemps ?

La réponse vous permettra de vous projeter dans l’avenir de votre PJ. Une progression rapide vous donne la possibilité de donner dans la suite des aventures des compétences qu’il n’a pas au départ. Dans l’autre cas, il faut que le PJ corresponde à vos attentes dès le début. Parfois des personnages avec une grande expérience au départ s’avèrent un piège si on progresse peu par la suite car il arrive d’oublier une compétence essentielle et face à un MJ rigide, cela peut conduire à rendre le personnage ridicule. Exemple : faire un personnage d’espion albanais et oublier de parler des langues étrangères. C’est toujours bête de ne pas arriver à lire « Danger. Minefield ».

 

  • Les capacités des personnages permettront-elles des actions variées ou non ?

Certains jeux mettent des niveau de difficulté inatteignables pour des débutants. Il faut en être conscient. Voyez avec le MJ comment il interprète les choses ou lisez les règles. Si vous voulez assommer votre adversaire et qu’il s’avère que c’est impossible parce que vous n’avez pas la compétence ou que vous manquez d’expérience, autant le savoir pour vous éviter le ridicule surtout si vous vous êtes présenté comme un expert dans le kidnapping et que votre gros guerrier défonce le crâne de la frêle jeune fille que vous vouliez enlever.

 

  • Y a-t-il un système rigide de progression ?

Je vise tout particulièrement les jeux à « classe » de personnage. Dans certains systèmes, si vous êtes un guerrier, vous l’êtes ad vitam eternam. Impossible de faire un peu de magie ou même de savoir jouer du pipeau. Sachez donc si votre choix est définitif et votre personnage figé.

 

  • La manière de jouer votre rôle sera-t-il influencé par des caractéristiques (morales, idéologiques…) ?

Quelques jeux introduisent des régulations dans la façon de jouer votre PJ. Parfois de manière abrupte – Vous êtes Bon ou Mauvais –, parfois de manière chiffrée – Vous avez 70% d’être menteur, violent ou illogique –. Cela peut représenter un challenge mais il vaut mieux éviter d’avoir à jouer des traits que l’on se sent incapable d’incarner. J’ai souvenir d’un joueur bavard qui devait jouer un taciturne, challenge intéressant… Qui n’a pu être tenu plus de 5 mn. De même, évitez les mélanges qui finissent par vous dépasser. Le personnage « bon, porté sur la luxure, joueur, mauvais perdant, bavard et timide » va vite vous amener à des dilemmes difficiles à surmonter.

 

A suivre…

 

Un engin technomagique : le na-rails.

Un engin technomagique : le na-rails.

Dans le cadre du développement de mon univers de jeu « Les Fils des Éléments », je vous propose ce matériel de jeu. Sans être d’une originalité exceptionnelle, il s’intègre parfaitement dans l’univers que je conçois.

Nés de la magie, les engins élémentaires allient technologie et invocation élémentaires ou sortilèges de manipulation des Éléments. Les mages ont ainsi contribué à développer des moteurs utilisant des élémentaires de feu, des élémentaire d’air activant le déplacement d’engins volants ou à voile, des élémentaires de terre se déplaçant en surface et portant une structure, des élémentaire d’eau déplaçant des navires.

Ainsi, l’Empire – j’en parlerai à l’occasion – a développé les Na-rails, des navires sur rails alliant la technologie des wagonnets de mine à celle des navires à voiles. Des conducteurs utilisent leur pouvoir de « Vent » pour propulser des locomotives à voiles. A été construit une gamme d’engins plus ou moins gros et plus ou moins rapides suivant la puissance du souffleur.

Un na-rails de petite dimension conçu pour une vingtaine de passagers accompagnés d'un conducteur et d'un ouvrier de manoeuvre.
Un na-rails de petite dimension conçu pour une vingtaine de passagers accompagnés d’un conducteur et d’un ouvrier de manoeuvre.

Toujours se demander pourquoi ?

Toujours se demander pourquoi ?

J’ai hésité à appeler cet article « Le cercle vertueux de la création ». Dans les deux cas, je vois votre sourcil interrogateur qui se soulève. Je vous explique ce qui me passe par la tête :

Que l’on soit maître de jeu ou joueur, on crée. Un monde, une ville, un personnage ou une histoire. Il y a toujours un moment où l’on décrète un truc « Les barbares décident d’attaquer les caravanes marchandes », « Mon perso est paranoïaque », « Il n’y a pas de murailles autour de la ville », « Le dieu Untel est le plus vénéré ». Que ce soit tranquillement en préparant un scénario ou au débotté en cours de partie, on lâche tous des affirmations comme ça. D’où mon titre.

C’est à ce moment là qu’on doit se demander pourquoi ????

J’ai mis plusieurs points d’interrogation parce qu’on peut se demander pourquoi à chacune de ces affirmations et surtout on peut poser la question à plusieurs niveaux.

Prenons l’exemple des barbares qui attaquent les caravanes marchandes :

  • Pourquoi y a t-il des barbares dans la région ?
  • Pourquoi d’un seul coup ont-ils décidé d’attaquer alors qu’avant ils étaient paisibles ?
  • Pourquoi les marchands tiennent-ils absolument à passer sur cette route ?

Ca, c’est la première couche de « pourquoi », après on peut continuer à aller plus en profondeur, souvent en remontant le temps ou en construisant l’histoire à rebours.

En admettant qu’on ait répondu à la première question par « Il y a des barbares dans la région parce qu’ils sont descendus des montagnes, on continue en essayant de savoir pourquoi ils sont descendus des montagnes. De fil en aiguille on pourrait arriver à cela pour nos barbares :

  1. Les barbares attaquent les caravanes parce qu’ils sont descendus des montagnes.
  2. Il règne une telle famine dans les montagnes, que les barbares, pourtant endurants, ont dû rompre leurs engagements et s’en prendre aux peuples civilisés de la plaine.
  3. La famine est due au décès en masse du gibier, décimé par une terrible maladie. Pour ne rien arranger les cultures sont également atteintes par divers parasites.
  4. Bob le shaman a empoisonné gibier et plantations grâce à ses talents d’alchimiste pour pousser les barbares hors des montagnes.
  5. Bob est un gros frustré, il aurait bien voulu être nommé chef de guerre, mais c’est son frère, plus baraqué que lui, qui a été choisi. En poussant les barbares vers les plaines, il compte bien provoquer la guerre entre civilisés et barbares. Son frangin passera pour un raté quand les civilisés lui mettront une rouste. Après ça tout le monde se tournera vers lui qui aura pris soin de prêcher la paix pendant tout ce temps.

Je force le trait, il y a moyen de faire plus fin mais c’est un exemple. Là, on a remonté l’histoire à rebours. Dans mon intro je parlais de cercle vertueux. C’est à partir de ce moment là qu’on entame la deuxième moitié du cercle, le chemin retour.

On n’en est plus aux « pourquoi » mais aux « qu’est-ce que cela va provoquer d’autre ? ». Et on l’applique à tous les points importants énumérés.

5. Pour mettre son plan en place Bob devra se montrer discret en conciliateur et se comportera comme tel si les civilisés envoient des gens régler ce problème – les PJ ? Dans le même temps il cherchera à se débarrasser d’eux.

4. Il faut du matériel à Bob pour empoisonner la montagne, soit il l’achète à des civilisés en descendant en ville déguisé, soit il a des hommes de main pour l’aider dans ce sale boulot. Et si c’était les PJ qu’il manipulait, ça pourrait être intéressant qu’ils découvrent qu’ils ont participé contre leur gré à la famine et à la guerre entre civilisés et barbares.

3.Bob, prévoyant, s’est constitué des réserves pour ne pas être touché par la famine. Il a donc une cache où il entrepose aussi bien son matériel pour faire ses poisons que ses réserves de nourriture.

2 et 1. Le MJ va devoir imaginer les accords entre civilisés et barbares. Comment va se résoudre la guerre qui se prépare ? Va t-on envoyer des émissaires ? Des éclaireurs ? A partir de là je réponds par des questions parce que les possibilités sont très nombreuses pour le MJ mais on peut dire que la boucle est presque bouclée et qu’on peut repartir sur une nouvelle série de question/réponse.

Ne devrait-on pas se demander pourquoi les mages puissants se doivent d'avoir une longue barbe ridicule ?
Ne devrait-on pas se demander pourquoi les mages puissants se doivent d’avoir une longue barbe ridicule ?

Je voulais par cet exemple illustrer la théorie que j’appelle « Le cercle vertueux de la création » qui me semble être une bonne méthode de conception dans le cadre du JdR. Chaque réponse ajoute de la profondeur, et quand on a fait le tour des réponses, on revient au point de départ.  Cette façon de faire nécessite un temps de réflexion mais qui peut être pris tranquillement hors jeu. Cela n’empêche ni le MJ en cours de partie d’improviser une situation – il l’expliquera plus tard – ni le joueur de créer son personnage à la va-vite. Le tout est de faire ce travail après coup pour donner de la profondeur au jeu. Je n’ai rien contre l’improvisation mais tout baser sur celle-ci entraine le risque que si l’on gratte un peu la surface, on découvre un grand vide derrière ou que l’on se rende compte de l’illogisme de ce que l’on fait.

Cette procédure de réflexion de temps en temps permet d’éviter des déconvenues autour de la table de jeu.