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Et si on faisait volontairement des erreurs ?

Et si on faisait volontairement des erreurs ?

 

Que l’on soit maître de jeu ou joueur, si l’on s’amusait à commettre des erreurs (*), à ne pas optimiser nos personnages, à les rendre plus humains, est-ce que les parties n’en seraient pas plus intéressantes ?

 

* Dans le terme « erreurs », je regroupe plusieurs choses : tout ce qui sort de ce qu’on attend d’un personnage, tout ce qui constitue ses petites faiblesses, les aléas de la vie quotidienne, les actions ou décisions incongrues. Bref, tout ce qui ne fait pas totalement partie de l’histoire qu’on est en train de jouer.

 

 

Je ne sais pas vous, mais moi, les héros trop parfaits, ça m’ennuie. Qui plus est, je n’y crois pas et ça ne me fait pas vraiment rêver. Je n’apprécie pas plus pour autant l’archétype caricatural du vrai-faux rebelle genre ado attardé, la mèche sur les yeux, mal rasé mais juste ce qu’il faut qui défie la société mais pas trop quand même. Ce que je trouve intéressant, ce sont les personnages avec des défauts humains, petits ou grands. Du gars qui boit trop de café à celui qui tuerait père et mère pour arriver à ses fins. Ce sont ces défauts qui mettent les grains de sable dans des histoires trop bien huilées.

 

En JdR c’est pareil… Et pourtant on le joue rarement.

Je m’explique : rares sont les joueurs qui veulent admettre l’humanité de leurs PJ, ça manque de classe et d’héroïsme. On cherche à optimiser pour ne pas se faire dépasser par le scénario. Habitudes des jeux de société, peur de perdre.

 

MJ = PJ

Mais c’est pareil pour le MJ. Lui aussi aime bien ses PNJ ; les ennemis des PJ font rarement des trucs qui ne soient pas calculés. Qui n’a pas vu un MJ faire des pieds et des mains, avec une pointe de mauvaise foi, pour sauver son grand méchant ? Attaquez un camp ennemi, vous verrez, les gardes ne sont jamais malades, aux toilettes, partis fumer une clope, en train de regarder un match de foot sur leur portable, en réunion syndicale, au pot de départ d’un ancien, en train de somnoler parce que la veille c’était la fête nationale, etc.

 

Le MJ peut considérer que, de temps en temps, ses PNJ ne font pas ce qu’ils devraient normalement faire. Pas nécessairement de grosses erreurs mais juste faire des actions banales autres que celles que le scénario leur octroie. Si ça l’amuse, il peut se fixer des chances et faire un jet de dé pour voir si son PNJ agit de manière inhabituelle. Ou improviser quand il estime que c’est intéressant. L’essentiel est de d’insuffler de la vie, du réalisme et de petites surprises à vos PJ.

 

Pour les joueurs, il existe bien des règles dans certains systèmes de jeu imposant des contraintes (traits de caractère, nécessité de passer une heure en prière au lever du soleil, tares…) mais finalement est-ce que ça n’est pas plus intéressant quand le joueur s’impose lui-même des actions sources de problèmes ? En fonction de ses envies,  de son inspiration et des circonstances.

 

Quelques exemples 

  • Faire confiance à un PNJ alors que tous les signes extérieurs laissent entendre que c’est un ennemi.
  • Oublier ses clés de voiture régulièrement.
  • Considérer que le PJ est un tire au flanc et roupille une fois sur deux lors des gardes.
  • Décider que le PJ s’est pris de passion pour une activité coûteuse (golf, tourisme, collection de voitures anciennes…) et dépense son argent comme cela plutôt que pour acheter du matériel utile pour les scénarios.
  • Picoler au point d’être saoul le soir où les ennemis doivent attaquer, soit parce qu’il s’en fout soit parce qu’il a peur.
  • Se balader sans armure, juste parce qu’il fait trop chaud ou parce que ça n’est pas à la mode.
  • Tomber amoureux d’un PNJ – important ou pas –.
  • Décider qu’on s’est levé du mauvais pied ce matin et être irritable pour la journée.
  • Avoir des problèmes existentiels qui jouent sur l’humeur du PJ ou le poussent à aller consulter un psy.
  • Avoir une crise mystique et se mettre à croire et à pratiquer une religion.
  • Détailler de petites actions sans grande importance de temps à autre (faire les courses, jouer au PMU, se balader en forêt…)

 

On peut volontairement faire des erreurs pour pimenter le scénario mais on n'est pas obligé de faire n'importe quoi non plus...
On peut volontairement faire des erreurs pour pimenter le scénario mais on n’est pas obligé de faire n’importe quoi non plus…

 

Récompense possible

Le MJ peut utiliser ces erreurs pour compliquer la vie des PJ mais il peut aussi les récompenser.

Oublier ses clés de voiture peut éviter d’être présent quand une bombe explose, se balader sans armure permet de se cacher plus discrètement au passage du dragon, avoir des copains au PMU peut être une source de renseignements.

La récompense n’est pas une fin en soi mais il faut surtout éviter la punition mesquine systématique. Le MJ qui pourrit la vie de ses joueurs dès que ceux-ci font volontairement du superflu ou des bourdes va vite se retrouver avec des joueurs qui se contentent de suivre le scénario avec la prudence du soldat dans un champ de mines.

 

Personne n’est parfait

Regardez vos héros préférés, les personnages célèbres ou, plus simplement, les gens autour de vous, et vous verrez que personne n’est exempt de commettre des erreurs. En faisant de même, vous crédibiliserez votre PJ, vous le rendrez plus humain, sans pour autant saboter son statut de héros.

 

Mais… Mais, finalement c’est du roleplay !

Ben oui, c’est du roleplay, tout simplement. Du roleplay qui alimente l’histoire, brouille les pistes ou en lance de nouvelles, donne des idées au MJ, apporte de la vie à la partie. Ne vous en privez pas !

Tuto Débutants 2. Être joueur.

 

Tuto Débutants 2. Être joueur.

 

Après le succès du tutoriel « Etre maître de jeu » je me devais d’enchaîner sur la thématique du joueur. Logique mais pas si simple que ça a aborder.

 

L’exercice est périlleux car il n’y a pas de bonne façon de jouer. L’univers, le MJ, les règles, l’ambiance : de nombreux facteurs changent la donne. Contentons nous de ne considérer que les éléments communs à tout jeu de rôle. En fait – et c’est bigrement bien fait, vous allez voir ! – tout est dans l’intitulé : jeu de rôle.

 

Pour ceux qui auraient des doutes, le jeu de rôle, ça n'est pas tout à fait ça...
Pour ceux qui auraient des doutes, le jeu de rôle, ça n’est pas tout à fait ça…

 

En premier lieu, il y a le jeu. En l’occurrence un jeu en groupe. Donc la notion « number one », c’est la convivialité. Ça parait évident mais contrairement à d’autres jeux où la compétition est de mise, il n’y a pas cette notion dans le JdR. Hé oui ! C’est un des rares jeux où il n’y a pas de gagnant. Le but n’est pas de battre les autres joueurs. Pour quelqu’un qui n’a jamais pratiqué, ce n’est pas évident. Pour l’avoir souvent vu à des tables de débutants, les joueurs veulent montrer qu’ils sont les plus forts, les meilleurs, qu’ils peuvent bien se passer des autres, la preuve ultime étant de les éliminer  en fin de scénario ou de les rouler dans la farine en cours de partie. Je ne dis pas qu’il est interdit de tuer son prochain ou de l’escroquer mais ça ne doit pas être une fin en soi. Par contre, si on se regroupe à plusieurs autour d’une table, c’est bien pour jouer ensemble, sinon autant s’installer devant sa PS3.

Jouer de manière conviviale, c’est écouter les autres, leur laisser un espace d’expression, ne pas se montrer égoïste, ne pas s’emporter, etc.

Par exemple, si vous devez passer une heure en tête à tête avec le MJ pour régler les affaires personnelles de votre perso, soit vous associez vos partenaires de jeu à l’action, soit vous essayez de voir ça plus tard tranquillement sans forcer les autres à attendre que vous ayez fini.

Autre cas de figure : si vous n’êtes pas d’accord avec le MJ, dialoguez de manière constructive plutôt que hurler au scandale ou discutez avec lui tranquillement en fin de partie. S’il reconnait sa faute, il cherchera sans doute à la corriger d’une manière ou d’une autre.

Ca ressemble à un cours de morale, je sais, mais vous verrez qu’on ne se le répète jamais assez autour d’une table de jeu. En dehors non plus…

Le JdR ne force personne à respecter ce principe primordial. Il n’y a pas de règle pour ça. C’est aux joueurs d’en prendre conscience et de le respecter. Certains doivent se dire que j’enfonce des portes ouvertes. Ça ne me semble pas évident. Qui n’a pas vu Bob sortir 1 heure avec le MJ pour mettre au point son plan super-drôle-qui-ne-fait-rire-que-lui pendant que les autres se racontaient le dernier épisode de la série du moment pour ne pas s’ennuyer ? Qui n’a pas eu la parole coupée alors qu’il essayait de décrire son personnage par un « On s’en fout, jette les dés ! » Quel vieux joueur n’a pas eu un petit perso sympa fignolé avec amour qui s’est fait dégommer par un joueur moins fin mais qui trouvait « trop fun » de fusiller le scénario en faisant un truc bien absurde ? Allez, une dernière pour finir une liste connue mais désagréable à se remémorer : qui n’est pas rentré chez lui en se demandant s’il n’allait pas arrêter le JdR, juste parce que l’ambiance qui régnait autour de la table était détestable ?

En deuxième élément, il y a le rôle. On quitte le jeu pour entrer dans le rôle. Rien ne nous oblige à faire du théâtre mais on incarne au minimum autre chose qu’un pion sur une table. On sort du jeu de société pour entrer dans un machin extraordinaire : le jeu de rôle. Attention ! Si la notion de s’investir à minima dans un personnage fictif ne vous plait pas, arrêtez tout de suite, retournez jeu de l’oie, l’implication est moindre…

Chacun joue comme il le veut en entrant dans le détail de son personnage avec plus ou moins de précision. Certaines fiches de personnage se limitent à 2 lignes, d’autres à des chiffres complexes, d’autres encore à des historiques très fouillés mais dans tous les cas, on incarne un personnage. Alors au joueur de le faire vivre. Quatre facteurs vont principalement influencer la façon de le jouer :

  • Les règles. Elles peuvent être limitatives. Si vous débutez avec un personnage ayant une expérience faible, il est difficile de jouer un héros qui retourne des montagnes par exemple. Elles peuvent vous imposer des traits, des obligations, des tares dont vous devez tenir compte. Notez qu’être faible n’implique pas forcément d’être exempt d’avoir un comportement héroïque mais c’est une autre histoire – J’en parle dans l’article Qu’est-ce qu’un héros –.
  • L’univers de jeu. Il vous faut respecter les contraintes de l’univers, oublier vos réflexes de citoyen du XXIème siècle. La morale, la société, les coutumes sont différentes. Le joueur se doit d’essayer de coller au mieux à la logique imposée par l’univers. Sinon quel intérêt de jouer si vous vous comportez comme vous le faites dans la vie de tous les jours ? Contrairement aux autres jeux de société, aucune règle ne vous force à agir de telle ou telle façon, vous n’êtes guidés que par votre envie de faire partie du monde qu’on vous propose.
  • Le maître de jeu. Il a un rôle important car il décide de la façon d’appliquer les règles, de ce qu’il considère comme important dans l’univers, de l’ambiance qu’il veut privilégier. Un MJ qui applique les règles à la lettre et qui aime les scènes d’action musclées vous impose un style de jeu différent d’un autre porté sur la diplomatie et qui ne s’intéresse pas à la règle. Certains sont directifs, d’autres laissent les joueurs libres de leurs actions. On retrouve là une spécificité du JdR : la versatilité du concept. En JdR, tout est possible… et c’est déconcertant pour un non initié.
  • Le joueur. C’est vous le dernier facteur. Suivant vos goûts, vous allez décider comment vous voulez jouer. Votre investissement dans votre rôle est à la mesure de vos envies. Certes, vous devez tenir compte des trois autres facteurs mais il vous reste beaucoup d’espace dans ce triangle de contraintes : un peu comme un acteur dans une pièce de théâtre qui peut jouer de façon minimaliste, réaliste, excessive, grandiloquente, etc. C’est le moment de vous lâcher, d’être quelqu’un d’autre le temps d’une partie.

Une bonne partie du sel du JdR vient de l’intérêt d’incarner un personnage – parler comme lui, penser comme lui, réagir comme lui, même si cela ne vous semble pas rationnel –, alors nonobstant les contraintes évoquées ci-dessus, essayez de vous investir dans l’incarnation de votre personnage. Tout le monde autour de la table y gagnera en plaisir de jeu.

Complément à l’article « Qu’est-ce qu’un héros ? »

Mes pérégrinations sur la toile m’ont conduit à une vidéo intitulée « Jeu de Rôle et Littérature : quelle place pour le héros ? » filmée aux Utopiales 2012 qu’on peut trouver sur ce lien : http://www.paperblog.fr/6495850/jeu-de-role-et-litterature-quelle-place-pour-le-heros/

Je ne l’avais pas vu avant de rédiger mon article, je préfère le dire parce qu’il y a quelques points communs entre les avis des invités et les miens. Je ne voudrais pas qu’il soit dit que j’ai honteusement plagié les intervenants !

Je dis « quelques » parce que je constate que la définition du héros par les invités change d’une personne à l’autre, la mienne étant une variante de celles données. Je constate aussi qu’au fur et à mesure de la conférence, on passe de la littérature au cinéma, à la série télévisée et au jeu de rôles. A chaque média (j’inclus le jeu de rôles dans le mot média même si c’est matière à discussion) ses contraintes et en conséquence une façon de représenter le héros différente.

En écumant les forums, j’ai vu des avis et des pratiques de jeu dissemblables. D’ailleurs tout le monde ne joue pas pour incarner un héros. Le JdR est ludique avant tout ! Certains jouent pour jouer. Sans autre arrière pensée.

Le jeu de rôles ne vient-il pas du wargame au départ ? Le Grand Ancêtre qu’est D&D a bien été créé par des wargameurs, donc avec des notions bien éloignées de celles que l’on a maintenant dans notre univers de joueur.

Rendez-vous dans 20 ans pour voir ce l’avenir de notre pratique et ce que sera l’image des héros.

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Qu’est-ce qu’un héros ?

La plupart des jeux de rôles nous laissent entendre que nous allons jouer un personnage hors du commun soit parce qu’il détient LA vérité, soit parce qu’il est au dessus du lot ou encore parce que c’est un élu. Allons-nous jouer des héros ? Sans doute. Mais qu’est-ce qu’un héros dans les JdR ? Chacun sa vision. Essayons de faire un peu de tri.

Une certitude : autour de la table de jeu, il est fort probable que chacun ait sa vision du héros – des joueurs au MJ en passant par les concepteurs du jeu. Il peut être judicieux lors de la mise en place du jeu de faire une petite mise au point pour que tout le monde soit à peu près sur la même longueur d’onde.

Personnellement je conseillerais au MJ d’expliquer comment il interprète le rôle des PJ dans l’univers qui va être joué, de demander ensuite si dans le contexte du jeu présenté les joueurs sont d’accord ou s’ils ont un autre point de vue et d’essayer d’arriver à un consensus avant de jouer. Ça évitera de désastreuses parties où l’incompréhension règnera autour de la table.

Autre facteur : la notion d’héroïsme sera abordée différemment suivant que l’on joue à Paranoïa, Cthulhu ou D&D. L’ambiance et le système de règles influeront sur la « vie » des héros. Là aussi au MJ de faire une mise au point avec les joueurs quitte à modifier les règles pour que tout le monde y trouve son compte.

Pour le mot « héros » il est écrit dans le dictionnaire Larousse :

  • Personne qui se distingue par sa bravoure, ses mérites exceptionnels, etc.
  • Principal personnage d’une œuvre littéraire, dramatique, cinématographique.
  • Personne à qui est arrivée une aventure, qui a joué le principal rôle dans une certaine situation.

On voit qu’il existe déjà plusieurs définitions officielles pour caractériser un héros. Et la multiplication des visions du héros se retrouve dans le JdR. Je vais essayer de reprendre des archétypes héroïques que l’on retrouve en JdR, parfois en forçant un peu le trait. Les combinaisons entre les différentes versions sont fréquentes :

  • Le balaise. C’est le plus commun en JdR. En terme de jeu  il est meilleur que l’humain normal – si tant est que le jeu permette de jouer des humains. Plus fort, plus intelligent, plus bourré de pouvoirs. Il affronte des obstacles que le commun des mortels ne peut affronter. Par contre il peut avoir une mentalité de gratte papier, de perfide salaud ou de poule mouillée, là n’est pas la question. Il n’est pas tenu de se comporter héroïquement mais il est le héros.
  • La fusée. Au départ il est au ras du sol, comme tout le monde. Et au fur et à mesure il monte, il s’élève largement au-dessus des autres. Très commun et inspiré du grand ancêtre qu’est D&D. Il devient supérieur aux autres par la progression – souvent basée sur un système de niveaux. En général il se transforme en balaise avec le temps. A noter qu’il devient héros par la force des choses. Peu importe ses vertus ou la qualité de ses actions. Le tout est de cumuler de l’expérience. Jamais la fusée ne redescend sur terre. Au pire elle disparait à tout jamais dans les niveaux où il n’y a plus de règles. Je me suis toujours demandé où était l’héroïsme dans cette vision du jeu. Certes les adversaires qu’il affronte sont de plus en plus puissants mais ses moyens sont judicieusement calculés pour qu’il réussisse. Et bien souvent la puissance du PJ remplace la ruse dont il pouvait faire preuve à ses débuts.
  • Le bol-man. c’est un gars à peu près normal mais il dispose de points de chance / karma / héros / bol / destinée / aventure / etc. Ou d’un MJ qui l’aime bien… Il peut donc tenter des trucs au-dessus de la normale avec des moyens normaux MAIS mieux grâce à ses points. C’est une méthode pour compenser des règles souvent réalistes et meurtrières. C’est un bon moyen de simuler l’héroïsme même si parfois certains joueurs pervertissent le concept en faisant des actes plus idiots ou survivalistes qu’héroïques. J’ai des souvenirs de l’usage de points de héros à James Bond pour buter le méchant qui ressemblait plus à de l’acharnement que de l’héroïsme. Mais là encore le système ne présume pas de l’usage héroïque desdits points.
  • Le brave. contre vents et marées il essaie de faire le bien. Qu’il soit paladin ou super-héros, il met au service du bien des moyens au-dessus de la normale. Il est avant tout moralement au-dessus de la moyenne. Ses buts nobles font son héroïsme davantage que ses moyens.
  • Le centre du monde. L’aventure attend son existence pour naître. Le monde est figé s’il n’est pas là. Le ou les PJ sont le centre de l’aventure. C’est le MJ qui engendre l’héroïsme des PJ en faisant un effet de loupe sur leurs actions. Le défaut est de décrédibiliser le monde qui les entoure, de lui donner un aspect de décor en carton pâte. Par contre il incite les PJ à aller au devant de l’action puisque c’est eux qui vont la générer.
  • Les relations qui vont bien. Le PJ dispose d’un carnet d’adresse bien fourni qui lui permet de régler les situations à risque par PNJ interposé. « Je connais le mage qui maîtrise la téléportation, le guerrier qui combat comme un dieu et le forgeron qui fera l’épée tueuse qui va bien. Zou, c’est parti ! ». Après reste à trouver le troubadour pour chanter vos louanges quelque peu usurpées. Ce genre de situation apparaît souvent quand le MJ aime bien ses PNJ. Les héros c’est plus eux que les PJ, et le MJ se complait dans ce genre de situation. Et souvent les joueurs aiment bien ! Le côté « Je suis pote de Merlin / Luke Skywhooper / Mad Maxence », ça donne une sorte de complicité héroïque.
  • L’histoire pas les PJ. Les PJ vivent au milieu d’événements incroyables et rencontrent des héros – voir ci-dessus – mais eux ne sont que des témoins. Encore la faute du MJ. Après tout, avoir survécu à 20 ans de campagnes militaires fait-il de vous un gars qui a dû bien se planquer pour survivre ? Comme dit le Larousse, un héros peut être une « Personne a qui est arrivée une aventure ». Traverser l’Histoire peut être considéré comme une aventure mais en termes de jeu c’est un peu léger.
  • Le looser. Mauvais tirage, acte volontaire du joueur, caractère dominateur du MJ, le PJ est un looser, n’est pas adapté aux aventures, ne peut rien entreprendre sans que ça tourne au désastre, les adversaires l’écrasent par leur supériorité, etc. MAIS il survit. On peut aussi l’appeler l’anti-héros. C’est une forme de héros. Cosette dans «Les misérables » ou Woody Allen dans « Meurtre mystérieux à Manhattan ». Il n’a pas les moyens d’être un héros, donc tout ce qu’il tentera sera toujours un acte héroïque. Tout le monde n’aime pas jouer ce type de PJ, alors il faut qu’il soit pleinement choisi par le joueur sinon il finira vite au placard, ou le joueur ira jouer ailleurs.  Ce genre de situation est plus gênante quand il s’agit d’une façon de jouer imposée par le MJ : quoi que fasse les joueurs le MJ passe son temps à les mettre en situation d’échec ou d’humiliation – leur ennemi se sauve toujours, ils finissent ruinés à chaque scénario et ça empire, ils sont régulièrement ridicules, etc. Si ça peut être amusant voire générateur d’un stress stimulant, ça peut lasser aussi car l’héroïsme est rarement relié à l’échec. Cela peut rebuter les joueurs à plus ou moins long terme.
  • Le mort. « Il est mort en héros ! ». On entend souvent cette petite phrase. Sauf qu’en termes de jeu c’est un peu frustrant de perdre son PJ. Mais n’est-ce pas une belle façon de retirer avec classe un PJ en le faisant mourir héroïquement ? Quitte à prévoir la possibilité d’une création d’un nouveau PJ tout aussi puissant et intéressant pour compenser la perte.

Voilà quelques déclinaisons du héros de JdR. Ou de moyens de jouer l’héroïsme. Je suis loin de partager ces différentes visions et j’imagine que vous, lecteurs, en avez d’autres. Agrémentez l’article si vous le voulez bien.

 

3 héros
Chaque pays a ses archétypes de héros. Ici l’Américain, le Français et l’Albanais.
L’imagination fait le reste…

D’autres interrogations me viennent à l’esprit :

La notion de héros se marie-t-elle bien avec la notion de groupe tel qu’on trouve en JdR ? Ne parle-t-on pas du héros solitaire ?

Notre vision nombriliste ne nous pousse-t-elle pas à ne voir que notre PJ comme héros de l’histoire ? Avez-vous souvent vu des joueurs sacrifier le jeu de leur PJ pour mettre en valeur un autre PJ ? Notre activité est grégaire mais notre plaisir solitaire ?

Les bribes de compétitivité du Jdr, résidus des notions ludiques traditionnelles, sont-elles compatibles avec le concept d’idéal héroïque ? Nombreux sont ceux qui prennent plaisir à gagner « à tout prix ».

Je ne me suis attaché qu’à la notion de héros en terme de jeu de rôles. Je n’ai pas la prétention d’étudier l’image que l’on se fait du héros suivant les cultures et suivant les époques. Il y aurait beaucoup plus à dire. Ne sommes-nous pas passés du Prince Charmant à Tyrion Lannister, de Doc Justice à Docteur House ou D’Arsène Lupin à Dexter ? Lequel est un héros ?

La définition du héros dépendra toujours de celui qui le crée, comme si vouloir établir des règles ne pouvait fonctionner pour ce concept. Finalement on en revient au travail préliminaire que je suggérais : s’accorder sur ce qu’on veut jouer et avec quel atmosphère on veut jouer. S’affranchir de l’égoïsme et des objectifs de victoire. Ne garder que la beauté du jeu et de l’histoire jouée à plusieurs. Et là nous serons les Héros de notre rêve commun.

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